À fond le gamay, le renouveau des crus du Beaujolais
Le Beaujolais ne se résume pas au Beaujolais nouveau. La preuve avec 3 domaines qui misent sur une large palette de crus
Au delà du beaujolais nouveau, le renouveau du beaujolais
Le Beaujolais a des crus, et ils vont faire parler d’eux. Ils ont une place à prendre entre les Bourgogne et les Côtes du Rhône. Mais pour cela, ils doivent gommer l’image du beaujolais nouveau. Comme le prix des vignes est resté « raisonnable », des nouveaux venus se sont installés. Apportant plus de dynamisme.
Le Château du Moulin à vent
Jean-Jacques et Edouard Parinet, le père et le fils, ont repris le Château du Moulin-à-Vent en 2009. « Une envie de changer d’orientation, aller vers le terroir. C’est un projet familial » explique Edouard Parinet. Les 30 hectares de gamay produisent désormais entre 80.000 et 100.000 bouteilles. « Avant, les anciens propriétaires faisaient 1.000 bouteilles, le reste était vendu en vrac ». Ils ont conservé l’équipe en place pour « garder les compétences ». Brice Laffond supervise et vinifie. « Nous traitons bien la vigne, plutôt en biodynamique mais pas de label bio, trop contraignant inutilement » explique-t-il. Même si cinq parcelles sont élevées en bio, ce qui permet d’avoir des points de comparaisons avec le non bio. Il a fallu ensuite développer le commercial. « Nous vendons 50% en France, dont des grands restaurants, et 50% à l’étranger: Québec, Benelux, Danemark, Asie etc. Mais peu au Japon qui sont bien servis (trop ?) en Beaujolais nouveau et peu attirés par d’autres crus de l’appellation ». Il fournit aussi une cuvée spéciale pour Monoprix, les Terrasses du Château ; et trois sélections parcellaires : Croix des Vérillats, Champ de Cour et La Rochelle. Les cuves sont inox, alors que la plupart utilise les cuves béton dans le beaujolais. « C’est mieux pour l’hygiène. On a essayé les foudres en bois, mais c’est un casse-tête pour l’entretien, le nettoyage » raconte Jean-Jacques Parinet. Un tiers des vins passent en fûts, des fûts achetés neufs et utilisés jusqu’à 3-4 vins avant d’être revendus en Ecosse. Pour les whiskys.
> Prix de 13 € (Couvent des Thorins) à 29 € (La Rochelle). chateaudumoulinavent.com
Le Domaine de Briante
Il y a aussi Lauren Faupin et son mari Romain Schneider. La famille Faupin a racheté le domaine de Briante en 2011, ses douze hectares de Brouilly et côte de Brouilly plus un hectare en chardonnay pour faire du blanc. C’est Lauren, œnologue de formation qui en a pris la direction après deux ans passés dans les grandes régions viticoles du monde (Toscane, Nouvelle-Zélande, Orégon, Colombie britannique…). Elle a rajouté de l’œnotourisme avec trois chambres d’hôtes ouvertes en 2012. Un gîte pourra accueillir 8 personnes la saison prochaine. « J’avais cette envie de m’installer et de faire cette double activité, vins et chambre d’hôtes. Le Beaujolais offre un très beau potentiel pour les deux » explique-t-elle. Ils ont aussi complétement rénové le cuvage, pour assurer la tranquillité des clients pendant les vendanges. Ils proposent la vente en bouteilles plutôt que le vrac sur une gamme courte : deux Brouilly, deux Côte de Brouilly, un Beaujolais Blanc et un Moulin-à-Vent suite à l’acquisition de 2 hectares sur cette appellation. Curieux et expérimentateurs dans l’âme, le couple tente l’amphore. Ce contenant en terre cuite de 400 litres, réalisé en Toscane, a accueilli du Côte de Brouilly millésime 2016 ; l’élevage se fait sur 9 mois. Une cuvée spéciale verra très certainement le jour. « C’est un travail minutieux. » L’amphore est remplie au trois quart de grappes entières, manuellement. La vinification se fait sur 10 jours. Après un pressage délicat, le vin est remis dans l’amphore.
> Les prix vont de 8,20 € pour le Blanc à 14 € pour le Moulin-à-Vent. domainedebriante.fr
Les Domaines Piron
À côté des nouveaux venus le territoire, des anciens sont toujours dynamiques et ardents défenseurs du gamay et du beaujolais. Dominique Piron, qui a débuté en 1971, vinifie aujourd’hui la production de 95 hectares en propre ou en location avec son associé Julien Révillon qui est également propriétaire de 7 hectares. . Il a su profiter des ventes consécutives à des successions pour s’agrandir. « Les prix étaient relativement bas, 10.000 € l’ha en Beaujolais Village ; 30.000 € dans les crus ». Spécialistes du Morgon, les Domaines Dominique Piron produisent maintenant dix crus dont du Chenas, du Chiroubles, du Fleurie, du Brouilly, du Saint-Amour et des cuvées parcellaires Morgon Côte de Py, Régnié Croix Penet, etc., du Beaujolais Village et du Nouveau. Les Domaines arrosent une cinquantaine de pays avec une production de 800.000 bouteilles, issues d’une viticulture durable et d’une vinification traditionnelle.
> Les prix départ cave vont de 6,50 € pour le Beaujolais tout simple à 16,00 € pour le Côte de Py, voire 35,00 € pour le Côte de Py parcellaire « les Pierres ». domaines-piron.fr
« Le gamay est un cépage magnifique. C’est la photo du terroir, du sous-sol. Il permet une multitude de possibilités. On peut faire des vins fruités, on peut jouer sur la simplicité, la matière. On peut faire des vins de garde. Mais c’est un cépage délicat. Il n’y a pas de gamay moyen. Ou c’est bon, ou c’est rien » raconte Dominique Piron, par ailleurs président de l’Inter Beaujolais.
Il poursuit sur l’histoire du Beaujolais. Les industriels lyonnais achetaient des propriétés dans le Beaujolais au XIXe siècle. Ils laissaient le travail des vignes aux métayers. Et ils n’investissaient pas. Puis il y a eu le raz de marée Beaujolais nouveau dans les années 50, une aubaine mais un boulet pour l’image du beaujolais. Festif, facile à boire et pas cher. Le gamay devient alors un vin de fête et seulement un vin de fête. « Il se vendait 23 millions de bouteilles en trois jours à la belle époque ». Maintenant c’est moitié moins. Et les choses évoluent. Il y a de nombreuses successions. Des nouveaux peuvent se lancer dans le Beaujolais, s’y exprimer. Et remettre le gamay au goût du jour avec comme atout des bons rapports qualité/prix.
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