Stéphan Perrotte, la "confiture" haute-couture
Stéphan Perrotte… Quand l’essentiel est dans le pot
Né à Sarcelles, le petit Perrotte se met très tôt au travail chez un charcutier de Deuil la Barre, déchargeant à 14 ans son premier camion de marchandises avant de passer au labo. Il se souvient encore de sa première coupure au doigt, en parant des rognons. “Plus c’est dur, plus j’y vais”, explique-t- il. Ce goût de l’effort ne le quittera jamais. Aux loisirs des adolescents, il préfère les stages dans des commerces de bouche. Il y ajoutera au fil du temps un esprit d’entreprise qui explique aujourd’hui son succès.
Charcutier, chef, commercial, boulanger et enfin confiturier à temps plein
CAP de Charcutier-Traiteur en poche, il se forge le caractère sous les drapeaux avant de devenir chef d’une brasserie dans le sud de la France. Il s’y épanouit dans le “fait-maison”, bien avant l’heure des décrets. Une belle année à travailler la matière. Assoiffé de savoir et de perfection, il remonte en région parisienne pour se frotter au commercial, à la distribution et à la recherche et développement. Pour différentes entreprises, il monte des circuits de distribution ou met au point des gammes de terrines, de crudités bios ou de sandwiches aux emballages recyclables. Installé en Anjou au mitan des années 2000, pour se rapprocher de ses parents avec sa déjà grande famille (Stéphan Perrotte est l’heureux père de six enfants), il reprend une petite boulangerie artisanale, à Saulgé-L’Hôpital où ses pains spéciaux sont primés en concours départemental.
C’est là qu’il s’essaye pour la première fois à la confiture. “Quand j’étais petit, en vacances à Valognes chez mes grands-parents, je voyais ma grand-mère préparer les confitures avec les fruits du jardin, cassis, groseille à maquereau, framboise, se souvient-il. La porte de ma chambre donnait directement sur le placard où elle les rangeait. J’y ai laissé quelques traces de doigts.” Pour alimenter les trois boutiques en zone rurale, il reproduit les gestes et les recettes de son enfance. Et ça plaît. Si bien qu’il franchit le pas en 2013 pour devenir confiturier à plein temps, seul dans un labo de 20m².
Et puis le titre de champion du monde de la confiture en 2015
Dès la première année, il obtient une médaille de bronze au Concours général agricole. En 2014, il est sacré Champion de France. En 2015, il décroche une médaille d’or au Concours général agricole et le titre de Champion du monde (à ce jour, il est le seul artisan français à cumuler les 2 titres, champion de France et champion du monde). Trois ans plus tard, en 2018, ses créations lui valent cinq médailles, toujours lors du Concours général. Une ascension fulgurante qui repose sur un respect absolu des fruits et de leurs saveurs, sur un travail acharné et sur l’innovation.
À quoi ressemble une « confiture » Stéphan Perrotte
C’est plutôt cocasse mais avec un taux de sucre de 50g pour 100g, les préparations de Stéphan Perrotte ne peuvent afficher l’appellation « confiture » (pour laquelle la teneur en sucre doit se situer entre 55 et 65g pour 100g). C’est un choix assumé, au service du goût et de la couleur, sans rogner sur la conservation, jusqu’à 10 jours au frais après ouverture. Entre nous celui qui n’a pas fini l’un de ses pots en 10 jours n’est pas encore né. Les fruits sont minutieusement sélectionnés pour leur goût, cueillis à maturité puis surgelés dans les 24 heures pour en préserver toutes les saveurs et les qualités organoleptiques. Ensuite, les fruits surgelés sont remis en température, avec du sucre (de betterave uniquement) et du jus de citron, dans des bassines en cuivre sur feu nu, au gaz. Tout se joue dans la maîtrise de la flamme. Le temps de cuisson varie selon les fruits mais est compris entre 15 et 20 minutes, jamais plus. Pour une cuisson à cœur, la confiture repose ensuite hors du feu toute une nuit. Pour finir, pas de pasteurisation mais la bonne vieille méthode de grand-mère : on remplit le pot, on le ferme et on le retourne. Tout est fait manuellement.
Histoire de vous mettre l’eau-à-la-bouche
Les préparations de Stéphan Perrotte se calent sur les saisons avec une collection printemps-été, une collection automne-hiver et quelques pépites en édition limitée. Les abricots, mirabelles et fruits rouges se marient avec du poivre de Timut, de la vanille de Madagascar ou du vin des Côteaux du Layon. La poire williams se marie délicieusement avec la truffe noire quand la fraise Mara s’habille d’une jolie pointe d’acidité grâce au jus de kalamansi, un agrume aux notes de pamplemousse et de fruit de la passion. En best of, on retrouve la pomme au jus de yuzu et sésame noir, une association surprenante qui marque les papilles. L’ancien boulanger façonne ses confitures comme un pâtissier imagine une recette. Chaque nouvelle saveur en bouche sublime la précédente et annonce la suivante. Et aucun goût n’écrase l’autre. Car, pour Stéphan Perrotte,“l’essentiel est dans le fruit, pas dans le mélange” et il n’y a pas un jour où cette passion, voir cette obsession, du fruit, ne quitte son esprit créatif. Et si vous mettiez les doigts dans les préparations du champion du monde des confitures…
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