La Pyramide – Maison Henriroux, là où la gastronomie devient mémoire
On franchit la porte de La Pyramide Maison Henriroux comme on entre dans un livre dont chaque page sent la gastronomie, le goût de l’hospitalité et le bonheur de faire plaisir. À Vienne, cette maison est plus qu’un restaurant : c’est une bibliothèque des saveurs, où se lisent les gestes d’hier et les audaces d’aujourd’hui. Ici, la cuisine parle bas mais dit tout, la table se fait promesse, et l’accueil – familial et précis – transforme chaque repas en souvenir.

Une maison qui porte l’histoire
La Pyramide naît au croisement des routes et des siècles : modeste auberge au XIXᵉ siècle, elle deviendra le laboratoire et la légende de Fernand Point, chef pionnier dont la maison fut l’un des premiers temples de la grande cuisine française. C’est dans ses murs que furent formés Paul Bocuse, les frères Troisgros et Alain Chapel. Sous la houlette de Fernand Point, l’établissement obtient une reconnaissance rare – une longévité d’exception au plus haut niveau gastronomique – et la maison a gardé cette aura de « lieu-culte » où l’on apprend ce qu’est la justesse du goût.
Aujourd’hui la Pyramide affiche en grand les lettres de la Maison Henriroux. L’établissement a été rénové, réinventé sans trahir ses racines et reste un repère historique dans le paysage culinaire français.

Patrick Henriroux, l’engagement d’un chef pour sa maison
En provenance de Mougins, Patrick Henriroux et son épouse Pascale arrivent en 1989 pour reprendre le flambeau : ensemble, il s’engagent à faire battre le pouls de cette maison emblématique. Un vrai défi. Rapidement, la maison revient sous les projecteurs des guides en conquérant une étoile Michelin en 1990 puis 2 étoiles Michelin en 1992. Son parcours est celui d’un artisan et d’un passeur : il a su rassembler autour de lui des producteurs, redonner de la voix aux terroirs et faire de la cuisine de La Pyramide une œuvre collective, où chaque acteur local a sa place.

L’esprit de la cuisine, terroir, simplicité haute couture et émotion
Entrer dans le cocon de la salle du restaurant gastronomique de Patrick Henriroux, c’est être invité à un concert intime. Dans la ville du jazz, la partition se joue sans fausses notes : excellence des produits, précision du geste et sens de la justesse. Ici, la cuisine ne cherche pas l’effet gratuit ; elle cherche l’émotion — ce frisson qui survient quand un produit bien choisi révèle son plein potentiel sous une cuisson maîtrisée et un assaisonnement au millimètre.
En 37 ans de bons et loyaux services, Patrick Henriroux a construit un réseau serré de producteurs — « autour d’une centaine de fournisseurs dans un rayon de 25 km » — pour travailler des pièces d’exception, légumes, viandes, fromages et poissons, choisis à maturité et traités avec une immense éthique de goût. Le résultat en bouche est net : les saisons exultent, les textures jouent, le chaud et le frais se répondent. Dans la salle, le service de haut vol est synchronisé, discret, tout en sensibilité, il accompagne chaque bouchée sans la couvrir.
Le guide Michelin reconnaît aujourd’hui ce travail par une notation qui place La Pyramide Maison Henriroux au sommet de l’exigence contemporaine : la maison figure parmi les tables deux étoiles, signe d’une cuisine d’exception qui marie technique et émotion.

Notre dîner exquis à la Pyramide
Le repas a commencé comme une confidence. D’abord un chou-fleur — simple, presque rustique — soudain transfiguré par la main de Patrick Henriroux : croquant de brassica, crème de parmesan en velours, éclats de caviar sturia qui claquent comme des étincelles salines, et ce veau du Limousin, tendre et doucement coloré au sautoir, nappé d’un jus balzam qui prolonge la caresse. Un premier accord qui dit déjà tout : la force de la terre apprivoisée par l’élégance de la main. Puis vint la livèche, herbe oubliée, qui enlace le crabe dormeur et royal dans une partition délicate de céleri. Le caviar ponctue, le saké Set Shuzo glisse — la bouche s’ouvre à une vibration marine, fraîche, presque japonaise, mais ancrée dans la générosité dauphinoise.
Le premier crescendo s’élève avec le turbot, plat emblématique de Fernand Point revisité pour notre siècle. Chair ferme et nacrée, barbillons confits à l’huile d’ail qui fondent dans la langue, bulle légère de champagne, et ce souffle floral inattendu, une boisson à la fleur de sureau qui danse comme une note blanche sur une partition ancienne. Puis, contraste ardent : les poivrons nains, éclat rouge vif, épousent la densité du tournedos d’Aubrac. La piperade se fait complice, la tapenade assombrit le jus, et la pulpe de basilic vient mettre une virgule verte dans cette phrase de viande.
Le Côte-Rôtie Les Triotes 2019 de la famille Garon accompagne cette partition. Son nez profond de fruits noirs, ses notes d’épices et de violette se glissent entre chaque bouchée, amplifiant la chair du bœuf, caressant le fumet de l’ail, répondant au sel du caviar. Un vin comme une main invisible, qui orchestre l’harmonie sans jamais voler la scène.
Le final, lui, se joue en deux mouvements. Le piano au chocolat, noir et or, résonne avec un sorbet intense, presque dramatique, qu’une sauce au café grillé vient électriser. Et puis, comme un clin d’œil d’éternité, la marjolaine, hommage aux deux siècles de la maison : chocolat, noisette, kirsch, praliné, tout en couches délicates, comme des pages qu’on tourne dans un livre de mémoire. On finit le repas le cœur battant, l’esprit rassasié mais jamais alourdi, avec cette impression rare que chaque plat a raconté une histoire, et que l’ensemble compose une symphonie de goûts où l’on se sent convié comme un intime.
Patrick Henriroux prend le temps de passer à chaque table. Il s’arrête, transmet un sourire, écoute un mot, partage une anecdote sur un produit, évoque un souvenir ou l’histoire d’un plat. Ce n’est pas un rituel figé, c’est une marque de générosité : celle d’un chef qui se soucie de savoir si le convive a trouvé ce qu’il était venu chercher — une émotion, un plaisir, une mémoire. En quelques minutes, il transforme l’expérience culinaire en rencontre intime, et rappelle que derrière chaque assiette, il y a une maison de famille.
L’hôtel 4 étoiles relais & châteaux, dormir au creux de la maison
La Pyramide Maison Henriroux n’est pas seulement une table ; c’est une maison-hôtel où se prolonge le récit. Le Relais & Châteaux propose un hôtel 4 étoiles à la décoration signée par Régis Dho : 19 chambres aux lignes contemporaines et 4 suites familiales, agencées pour le confort, le silence et la vue. L’atmosphère y est à la fois chaleureuse et design — on y retrouve la même exigence que dans les assiettes : matériau noble, lumière étudiée, literie généreuse. L’équipe, à l’écoute, veille à ce que le séjour soit sans couture, du petit-déjeuner tardif au retour discret après le dîner. C’est la promesse d’un repli doux après l’intensité des sens.
Espace PH3, la cuisine qui se fait spectacle (et conversation)
À côté du restaurant gastronomique, l’Espace PH3 propose une expérience plus vive et immédiate. Agencé autour d’une cuisine ouverte, PH3 invite au dialogue entre chef et convive : on regarde, on parle, on goûte — l’assiette y est plus intuitive, parfois plus joueuse, mais toujours fidèle au principe du produit bien travaillé. Le lieu, coloré et végétal, offre une cuisine de marché qui complète parfaitement la haute gastronomie du soir : un lieu pour un déjeuner en terrasse, un repas en famille ou un retour informel après une journée de dégustations.

Blue Pearl, le dernier verre, la pause confidentielle
Quand la nuit tombe, le Blue Pearl Lounge Bar se fait refuge. Pensé comme un salon feutré, il invite à conclure la soirée sur un cocktail, un digestif ou un vin de caractère, loin du tumulte. C’est un écrin intime — banquettes profondes, éclairage tamisé, service posé — où les conversations se prolongent et où l’on digère les émotions du repas. Le Blue Pearl est la touche finale d’un parcours : l’instant suspendu où l’on reprend le fil de la route, ou l’on décide de rester encore un peu.
La Pyramide Maison Henriroux n’est pas seulement une adresse à cocher sur une carte ; c’est une expérience à inscrire au creux de sa mémoire. À Vienne, la maison Henriroux est un refuge pour qui aime la cuisine qui donne des frissons, l’hospitalité sans ostentation et l’élégance simple des choses bien faites. Allez-y pour la tartelette d’un goût inouï, pour le geste précis d’un commis, pour la parole du vigneron servie au verre — et repartez avec l’impression d’avoir tenu, entre vos mains et votre bouche, un morceau d’histoire vivante.