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L’Isère, l’autre pays de la truffe

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Enfant des Dieux, miracle de la Terre d’après l’orage : que n’a-t-on pas imaginé sur la truffe, à l’époque où l’on croyait dur comme fer à la génération spontanée ? Même François 1er s’y est laissé prendre, parant le sombre ascomycète de vertus aphrodisiaques. Aujourd’hui, une chose est sûre : la truffe est un joyau inépuisable de la table  raffinée. N’en déplaise aux thuriféraires du Périgord, le sud-ouest de la France n’est pas l’unique terroir du diamant noir. Mosaïque de milieux naturels variés, la campagne iséroise offre toutes les conditions pour garantir la production de truffes : des bosquets de chênes pubescents mêlés de noisetiers et de charmilles sur des terrains aérés, bien exposés à la course du soleil et suffisamment drainés, donnent au mycophage l’espoir de glaner (« caver » serait plus juste) quelques précieuses pépites. On dénombre en Isère cinq à six espèces de truffes, et leurs poussées, un brin capricieuses, rythment l’année entière. Et si la royale truffe noire, qui émaille les coteaux calcaires du département, tient le haut du palais, la qualité gastronomique de ses cousines, truffes de Bourgogne, d’été et autre brumale, mérite aussi qu’on s’attarde à chiner sous les chênes. Pays de Cocagne : 80 % des terres d’ici seraient susceptibles d’accueillir l’un ou l’autre de ces tubercules. Certains cultivateurs ont d’ailleurs eu du flair. Leur fouillage passionné de la terre piquera la curiosité d’Henri Besson, futur maire de Lumbin : c’est lui qui les réunira dans le premier Syndicat des trufficulteurs du département de l’Isère, à l’aube des années 1960. Défrichage des sols favorables, création de pépinières ensemencées, vente et replantation : la filière des chênes truffiers était lancée, forte d’une trentaine de professionnels. Aux plus beaux jours, la production iséroise grimpa jusqu’à quatre tonnes par an. Après quelques décennies de disette et d’abandon, les truffières du Grésivaudan renaissent peu à peu, grâce à une poignée d’adorateurs. Une fête de la truffe est prévue l’an prochain à Grenoble. La filière repart à l’assaut, les appétits s’aiguisent. Les dindes de Noël s’en réjouissent déjà.

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Pascal Filuzeau et son chien Éclair

La truffe, une question de flair
Le piémont de la Chartreuse est le terrain de jeux de Pascal Filuzeau, chercheur de truffes au grand cœur. Ce soir de juin, le vent souffle fort dans la chênaie de Lumbin. Pas un temps à mettre un chien dehors. Et pourtant Éclair est là, fidèle, plus ou moins, à son maître. « Il est encore jeune, il apprend ». Pascal Filuzeau a un peu de mal à lui faire débusquer les truffes tapies sous l’humus, alors il l’encourage avec un petit bout de saucisse glissé sous le museau. Il y a encore quelques mois, c’est Pepito qui s’attelait à la tâche. Pepito n’est plus. La relève manque d’un peu de constance, mais peu importe : Pascal Filuzeau a l’œil alerte et la main fine. « Ici dans ce croissant de terre sans herbe qu’on appelle le brûlé, en tâtant un peu, vous pouvez en trouver.» L’instinct, travaillé avec plus de vingt ans de pratique, fait pour beaucoup. Et c’est finalement sur une vingtaine de truffes d’été (Tuber aestivum) que ce Provençal passionné mettra la main, en un peu plus d’une heure de patients fouillages.

Un sacré filon
La truffe affleure parfois, se cache le plus souvent, sous cinq à dix centimètres de terre. C’est là qu’il faut utiliser le « cavadou », ce drôle de pic à glace, pour extraire les précieux ascomycètes de leur gangue caillouteuse. Ni le flair ni l’outil ne garantissent une bonne récolte. « C’est un champignon têtu. Des années trop sèches ou trop humides, et la saison est gâchée.» Mais on peut aussi s’offrir de belles surprises. En débroussaillant un terrain près d’ici, Pascal Filuzeau est tombé un jour sur un sacré filon : « Il y en avait près de cent vingt, des truffes de Bourgogne. Et le lendemain, nous en avons trouvé autant ». Lorsqu’il ne compte pas les truffes, Pascal Filuzeau, boucher de métier, entretient les truffières des propriétaires privés. Le secrétaire du Syndicat des trufficulteurs de l’Isère partage aussi sa passion, auprès des écoles, sur les marchés et dans les foires, et parfois même à la télé. Presque toujours accompagné par son chien : gardien du terroir et de l’image, à défaut de bonne truffe.


> Pour en savoir plus :
www.truffe-du-gresivaudan.com


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Texte : Rédaction du magazine Exquis

© Crédits photos : ©Anthony Cottarel

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